POUR UNE DERNIÈRE FOIS, UNE HISTOIRE

J’écris ce message suite aux demandes répétées de plusieurs personnes; je ne sais pas si le cœur y est, si je saurai exprimer l’inexprimable, si, quelque part, l’Afrique ne m’a pas brûlé de ses rayons, de son aura, au point ou le langage n’est plus le même, arraché à sa tranparence.


Les quelques heures avant mon départ furent magiques, enivrantes, alcoolisées de Castel et émotives comme les adieux qui n’en reviennent jamais. Les gens de GIWUSA ont célébré mon départ; bouffe, bonnes bouteilles, cadeau. Un cadre avec deux statuettes sculptées en bois, deux femmes africaines. J’étais ému, et tout un pan de sentiments m’ont traversé, une dernière fois, et j’ai serré des corps contre moi pour dire merci, et j’ai serré des mains pour sentir la force et la douceur, et j’ai embrassé des joues pour un je t’aime.


Le retour, quant à lui, fut chaotique; j’étais supposé arriver le 2 avril mais le changement de date que j’avais effectué en février n’était plus valable; les douaniers ont confisqué l’alcool que j’avais rapporté de Cape Town; l’avion eut un retard de trois heures et lorsque je suis arrivé à Montréal mes bagages avaient disparu. Après plus de 46 heures sans dormir, j’ai pleuré de fatigue et d’une écoeurite aigue.


Le retour, les amis, l’abondance, Pâques, Place Laurier, la folie du monde, la folie de l’inconscience, notre folie, à moi et à nous, à tous, comme une grande faux au-dessus de nos têtes, m’a sauté à la figure et devant tant de tout j’ai faibli, j’ai compris que le changement qui s’est opéré chez moi lors de ce voyage n’est pas éphémère; il est maintenant ancré à un port d’attache plus fort que l’oubli. Ce port, de Québec à Amsterdam, de Cape Town à Casablanca, de la Floride à Montpellier, de Barcelone à Tegucigalpa, est le même : il s’agit de l’humanité.


Un jour je repartirai pour voir d’autres montagnes et d’autres visages; je rencontrerai des fleurs et des lions, des eaux plus salées que le feta et je m’allongerai dans un dépotoir pour me nourrir de vers et des débris laissés par la richesse. Je tenterai, avec ma caméra, de capter un peu de dignité pour l’offrir à ceux et celles qui n’auront aucune idée de ce qu’est la pauvreté de l’être et surtout, de ce qu’est l’exploitation de l’autre.


Alors je ferai un peu la paix avec l’ici…

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